Lorsque des difficultés financières surviennent dans une entreprise, il peut être nécessaire pour l’administrateur judiciaire de prendre des mesures pour assurer la sauvegarde de ses intérêts. La résiliation du bail commercial devient alors un outil essentiel permettant de réduire les charges et de réorganiser l’activité. Cependant, cette décision ne peut être prise à la légère, car elle implique des conséquences juridiques importantes pour toutes les parties concernées.
Sommaire de l'article
Définition d’un bail commercial
La question du sort du bail commercial dans les procédures collectives est un enjeu majeur, étant donné que le bail constitue souvent l’actif le plus précieux du fonds de commerce. Cette problématique suscite de nombreuses interrogations et donne lieu à un contentieux important.
Le droit des procédures collectives vise à préserver la valeur du bail commercial afin de maintenir l’activité de l’entreprise ou de réaliser rapidement sa cession pour le bénéfice des créanciers. Et cela, tout en offrant des possibilités de résiliation des créances générées par le bail dans des conditions spécifiques. Ainsi, lorsqu’un commerçant se trouve en situation de procédure collective (sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire), la résiliation automatique du bail commercial n’est pas systématique.
Aux termes de l’article L.622-13, II du code de commerce :
« L’administrateur a seul la faculté d’exiger l’exécution des contrats en cours en fournissant la prestation promise au cocontractant du débiteur » et a, à ce titre, la faculté d’exiger la continuation du contrat de bail souvent essentiel pour la poursuite de l’activité du débiteur.
L’article L.622-14 du Code de commerce prévoit spécifiquement le régime applicable à la résiliation du contrat de bail commercial.
L’application jurisprudentielle sur la résiliation du contrat de bail
La résiliation du contrat de bail commercial intervient :
- Au jour où le bailleur est informé de la décision de l’administrateur de ne pas continuer le bail…
- Lorsque le bailleur demande la résiliation ou fait constater la résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d’ouverture, le bailleur ne pouvant agir qu’au terme d’un délai de trois mois à compter dudit jugement (2°).
Dans un arrêt du 24 janvier 2018, la chambre commerciale a apporté une précision sur la résiliation du bail commercial. Elle affirmait que :
« L’administrateur judiciaire peut résilier le bail commercial qu’il a d’abord poursuivi même s’il dispose des fonds suffisants pour continuer à payer les loyers, mais il ne peut pas différer la date de prise d’effet de la résiliation qui est fixée par la loi. » (Cass. com. 24-1-2018 no 16-13.333).
Une résiliation indépendante de la situation financière
D’une part, l’administrateur garde la faculté de résilier le bail quand bien même le débiteur dispose des fonds nécessaires. L’administrateur doit tout de même se prononcer sur la continuation ou la résiliation du bail après le jugement d’ouverture. S’il décide de la poursuite du contrat, il s’assure également de la solvabilité du débiteur nécessaire au paiement des loyers. Il s’agit toujours d’une option pour l’administrateur… Ce dernier n’étant pas obligé de poursuivre le contrat !
D’autre part, cette décision est très intéressante en ce qui concerne la date de résiliation. La résiliation du bail prend effet le jour où le bailleur prend connaissance de cette décision. L’article L.622-14 1° du Code de commerce régit cela. Ainsi, l’administrateur ne peut pas décider de la date d’effet de la résiliation sur sa lettre de résiliation.
Cette interprétation stricte de la loi est pour le moins curieuse car on ne comprend pas pourquoi l’administrateur ne pourrait pas accorder un préavis au bailleur, ce d’autant que ce préavis permettrait de réduire le risque d’une demande de dommages et intérêts du bailleur dans le cas d’une telle résiliation sans préavis.