Dans le tumulte du redressement judiciaire, la date de cessation des paiements devient un pivot essentiel pour remettre en question un éventail d’actes. Découvrez comment cette date peut être reportée pour élargir la période suspecte et favoriser la récupération d’actifs. Qui peut solliciter ce report ? Quelles sont les limites à ne pas dépasser ? Explorons ces questions cruciales
Sommaire de l'article
Mise en contexte
Dès l’ouverture du redressement judiciaire, le juge fixe la date de cessation des paiements afin de déterminer ce qu’on appelle la période suspecte. Le but est de remettre en cause un maximum d’actes existants pendant cette période, ce qui nécessite souvent l’expertise d’avocats en droit des affaires.
En effet, on considère que la société était déjà en état de cessation des paiements et n’étaient donc pas en mesure de conclure ces actes.
La date de cessation des paiements peut faire l’objet d’un report permettant d’agrandir la période suspecte. Donc, l’avantage est de permettre la récupération d’un maximum d’actif pour la procédure.
Après avoir présenté le mécanisme du report de la date de cessation des paiements, cet article illustrera l’articulation de ce report avec la conversion en liquidation.
Le report de la date de cessation des paiements
L’article L. 631-8 du code de commerce dispose que :
Le tribunal fixe la date de cessation des paiements après avoir sollicité les observations du débiteur. A défaut de détermination de cette date, la cessation des paiements est réputée être intervenue à la date du jugement d’ouverture de la procédure.
Elle peut être reportée une ou plusieurs fois, sans pouvoir être antérieure de plus de dix-huit mois à la date du jugement d’ouverture de la procédure. »
Qui peut demander le report de la date de cessation des paiements ?
Le 3ème alinéa de l’article L. 631-8 du code de commerce dresse ainsi la liste de plusieurs acteurs pouvant demander ce report.
Il s’agit de :
- L’administrateur judiciaire,
- Le mandataire judiciaire,
- Le ministère public.
Toutefois, avant de se prononcer sur ce report, le tribunal entend le débiteur.
Quelles sont les limites à ce report ?
Un délai d’action limité
Les différents acteurs disposent d’un délai pour former la demande de report de la date de cessation des paiements.
Ainsi, le 4ème alinéa de l’article L. 631-8 du code de commerce dispose que « la demande de modification de date doit être présentée au tribunal dans le délai d’un an à compter du jugement d’ouverture de la procédure ».
Au-delà d’un an après le jugement d’ouverture, la demande de report sera irrecevable.
Un report limité dans le temps
La date de report ne peut excéder les 18 mois précédant le jugement d’ouverture.
En cas d’existence d’un accord amiable, la date de report ne pourra être antérieure au jugement ayant homologué l’accord.
L’appréciation de ce point de départ peut être délicate notamment en cas de conversion du redressement en liquidation judiciaire.
C’est d’ailleurs cette question qui a été posée à la Cour de cassation dans un arrêt de 2019.
L’incidence de la conversion sur le point de départ du délai de report
La chambre commerciale a dû statuer sur l’incidence du jugement de conversion sur le point de départ de l’action en report dans un arrêt du 27 novembre 2019 (n°18-18.194).
La conversion en liquidation décale-t-elle le point de départ du délai d’action
En l’espèce, une société a été placée en liquidation judiciaire. Cette liquidation a été prononcée par conversion du redressement judiciaire, 3 semaines seulement après le jugement d’ouverture. Le liquidateur a donc souhaité obtenir le report de la date de cessation des paiements.
La cour de cassation a donc jugé la demande de report irrecevable car le délai avait largement expiré. Pour la Haute Juridiction, le délai d’action courait à compter du jugement d’ouverture du redressement judiciaire. Comme la demande de report était postérieure au délai d’un an, cela ne pouvait aboutir.
L’inefficacité de la conversion sur le délai d’action
La cour de cassation a fait un choix fort dans l’interprétation de la loi.
En effet, l’article L. 631-8 du code de commerce ne donne aucune précision et ne parle que de « délai d’un an à compter du jugement d’ouverture de la procédure ».
La question du décalage de délai d’action pouvait donc légitimement se poser. Pour la cour de cassation, le texte vise la procédure de redressement judiciaire indépendamment d’une éventuelle conversion ultérieure.
Cette décision est un appel à la vigilance pour le mandataire judiciaire. Ce dernier devra vite analyser la situation de l’entreprise et veiller à ne pas former sa demande trop tardivement…
La cour de cassation a fait le choix de ne pas surfer sur l’opportunité de reporter le point de départ et a opté pour une sécurité.
Le cabinet LLA avocats reste à votre disposition pour vous accompagner et faire valoir vos droits en sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire.