Il arrive que les pactes statutaires prévoient, outre les statuts, certaines règles sur la cession d’actions. Ainsi, leurs dispositions sont confrontées avec celles des statuts. Selon la jurisprudence, les pactes d’associés ne doivent pas déroger aux statuts, mais peuvent les compléter (Com. 12 oct. 2022). Cette position entre dans le champ d’application de l’article L. 227-15 du Code de commerce, lequel sanctionne le non-respect des statuts en matière de cession d’action.
Sommaire de l'article
La cession d’actions, prévue par l’article 227-15 du Code de commerce, c’est quoi ?
Selon l’article L. 227-15 du Code de commerce, toute cession effectuée en violation des clauses statutaires est nulle. Les actions (dans les sociétés de capitaux) ou les parts sociales (dans une société de personne) représentent les parts de propriété des associés dans la société. Ces actions permettent à leurs propriétaires d’avoir des droits au sein de la société, tels que le droit de vote, de recevoir une partie des bénéfices…
L’importance des parts que l’actionnaire détient dans la société lui confère plus de droits que les autres actionnaires avec moins de parts. Par ailleurs, ces actions peuvent faire l’objet de transaction, c’est-à-dire de cession. Une cession d’action entraîne en principe la perte de la qualité d’actionnaire ou d’associé. Ainsi, lorsque ce dernier veut quitter l’aventure sociale, il n’a qu’à céder ses parts.
En outre, la cession d’action est un moyen pour l’entreprise de développer son activité en attirant de nouveaux collaborateurs et d’impliquer les employés dans l’entreprise. Néanmoins, il arrive que la cession d’action soit à titre de sanction afin d’exclure un actionnaire. Cette cession forcée est prévue dans une clause d’exclusion contenue dans les statuts. L’associé de la société est ainsi exclu lorsqu’un événement déterminé, clair et objectif se réalise et pas en dehors de ces cas précis.
La portée de l’article L. 227-15 du Code de commerce
L’article L. 227-15 du Code de commerce a pour objet de sanctionner par la nullité toute cession d’action contraire aux clauses statutaires.
Le principe de la libre cession d’actions
La cession d’actions au sein de la société est en principe libre. En effet, la cession est un droit inhérent à la qualité d’associé. Ainsi, ce dernier a la liberté de déterminer le prix de cession ainsi que son acquéreur. Si les statuts ne prévoient pas de formalités particulières, la cession ne nécessite aucun écrit, ni l’agrément d’un autre associé.
Néanmoins, il arrive que les statuts prévoient certaines modalités de cession ou certains mécanismes limitant la liberté de cession.
Pour ce faire, les associés conviennent par le biais de clauses statutaire ou extra-statutaire ces modalités. On peut citer par exemple :
- la clause de préemption,
- la clause d’agrément,
- la clause d’exclusion.
Il faut remarquer que la cession d’action n’entraîne aucune modification des statuts. Le but de ces clauses est de maîtriser la détention du capital social de la société.
La nullité de la cession contraire aux statuts
Une cession d’action peut être annulée si elle contrevient aux dispositions statutaires. Une cession d’actions de SAS conclue en violation d’une clause d’agrément par exemple ne sont pas nulles de plein droit. Elles sont susceptibles d’être annulées par le juge. Ce dernier doit apprécier la nullité à partir de l’article L. 227-15 du Code de commerce.
La clause d’exclusion dans le statut, une exception au principe de libre cession ?
Les statuts peuvent contenir une clause d’exclusion qui facilite l’exclusion d’un associé. En fait, l’exclusion judiciaire est une procédure considérée comme trop lourde. Cette exclusion engendre automatiquement la cession de ses actions.
1. La clause d’exclusion statutaire
C’est l’article L227-16 al. 1 du Code de commerce qui régit cette clause. Selon cet article, les statuts peuvent prévoir les cas dans lesquels l’associé est tenu de céder ses actions. Il s’agit d’une cession “forcée”, mais bien sûr consentie par les associés ou certains d’entre eux en avance dans les statuts. Sans clause statutaire, une exclusion d’un associé est nulle. L’associé évincé peut en effet, ester en justice contre une telle décision.
Il faut préciser que l’insertion d’une clause au cours de la vie sociale est plus difficile. En effet, elle doit être votée à l’unanimité des associés (Bull. Joly 2002, p.89, note H. Le Nabasque; JCP n°2002, 1237, note F.-X. Lucas).
L’exclusion peut reposer sur différents motifs, qui doivent, eux aussi, être prévus en amont dans la clause. Il peut s’agir de la violation d’obligations d’associé, violation d’une clause de non-concurrence…
Un associé exclu va se voir racheter ses actions selon les modalités des statuts (acquéreur, prix). Si les statuts sont muets, soit les modalités sont fixées d’une façon amiable, soit par un expert (art. L 227-18, al. 1 du Code de commerce).
2. La clause d’exclusion extrastatutaire
Il est d’usage que les pactes d’associés complètent les dispositions des statuts sur l’exclusion, comme dans le cas d’une affaire récente (Cass. Com., 21 juin 2023, n° 21-25.952).
Ce pacte établit un dispositif où une promesse unilatérale de vente est conditionnelle. Un pacte d’associés peut prévoir les modalités de l’exclusion sans qu’il soit contraire aux dispositions statutaires. Tout comme la clause d’exclusion inscrite dans les statuts, la clause extrastatutaire doit spécifier les situations et les procédures dans lesquelles l’exclusion pourrait se produire.
Les limites du champ d’application de l’article L. 227-15 du Code de commerce
Le champ d’application de l’article L.227-15 du Code de commerce est limité aux seules cessions en violation des statuts et non à la cession qui en découle. Ainsi, une cession d’actions en violation de clauses extra statutaires n’est pas régie par l’article précité.
Une violation de telles clauses n’encourt pas la nullité prévue par ledit article. Cette solution a été apportée par la chambre commerciale de la Cour de cassation (Cass. Com., 21 juin 2023, n° 21-25.952). Dans le cas d’espèce, le pacte d’associés réglementant la cession d’actions découlant de l’exclusion d’un associé est compatible avec les statuts.
Selon la Haute juridiction, l’article L. 227-15 du Code de commerce, a une portée générale et exclut les détails de la cession prévus dans une clause non statutaire.
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