En cas de cession de fonds de commerce ou de droit au bail, il peut arriver que le cédant demeure solidaire avec le cessionnaire du paiement des loyers et de l’exécution du contrat. En présence d’une clause de garantie du cédant au bénéfice du bailleur, insérée dans le bail commercial, le bailleur ne peut l’invoquer que durant trois ans à compter de la cession dudit bail (Article L145-16-2 du Code de commerce). Considéré comme d’ordre public, la jurisprudence a apporté des précisions sur la limite de la solidarité entre le cédant et le cessionnaire.
Sommaire de l'article
Les limites de la solidarité du cédant et du cessionnaire dans une cession du droit au bail
Le cédant peut être tenu solidairement avec le cessionnaire des obligations issues du bail en cas de clause de garantie prévue dans le bail. Toutefois, la loi limite cette solidarité à trois ans à compter de la cession.
1. Clause de garantie solidaire dans une cession du droit au bail
La cession du droit au bail est un acte par lequel le locataire sortant, appelé cédant, transmet le bail commercial, avec les droits et les obligations qui s’y rattachent, à un tiers cessionnaire. Il s’opère alors un changement de locataire, le cessionnaire devenant titulaire du bail. Le cédant est alors libéré de ses obligations nées de ce contrat dès que la cession est opposable au cessionnaire. Toutefois, il arrive que le cédant demeure solidaire avec le cessionnaire, des obligations issues du bail, lorsqu’une clause de garantie solidaire a été insérée dans le bail commercial.
En effet, les baux commerciaux prévoient, la plupart du temps, une clause de garantie solidaire dans laquelle le locataire sortant (cédant), s’engage solidairement avec le locataire entrant (cessionnaire) à payer les loyers à l’exécution du bail cédé. Cette clause présente un intérêt majeur pour le bailleur car il multiplie les chances d’être payé en cas de difficulté de paiement.
2. Limite de la garantie à trois ans à compter de la cession
La loi Pinel du 18 juin 2014 a limité la garantie solidaire du cédant. Auparavant, les clauses de garantie se limitaient à la durée du contrat de bail. Le cédant était alors tenu solidairement du paiement des loyers pendant la durée du bail (Cass. Civ. 3ème, 11 mai 1995). Cette obligation prenait fin dès que le bail prenait fin quel que soit le motif : résiliation amiable (Cass. Civ. 3ème, 18 octobre 2006) ou par l’effet d’un congé (Cass. Civ. 3ème, 4 mars 1998).
Désormais, la garantie de solidarité du cédant vis-à-vis du bailleur est limitée à trois ans. Cela signifie que le bailleur ne peut invoquer la clause de garantie que durant trois ans à compter de la cession de bail, comme le dispose l’article L145-16-2 du Code de commerce. Plus précisément, ce délai court à partir de la date de signature de la cession.
Le juge a précisé que, en l’absence de stipulation expresse contraire, la solidarité du cédant d’un fonds de commerce est limitée aux loyers impayés par le cessionnaire à la date de la résiliation du bail dès lors que le cessionnaire est placé en liquidation judiciaire (Cass. Civ.3ème, 28 septembre 2022).
Le non-respect des délais de garantie solidaire
La clause de garantie implique une obligation d’information du bailleur envers le cédant du défaut de paiement, faute de quoi il engage sa responsabilité contractuelle.
L’obligation d’information du bailleur
L’article L.145-16-1 du Code de commerce oblige le bailleur à informer le cédant de tout défaut de paiement du locataire en cas de cession du bail stipulant une clause de garantie. Il doit le faire dans un délai d’un mois à compter de la date à laquelle la somme aurait dû être acquittée par ce locataire.
La loi ne précise aucune forme, mais cela peut se faire par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Le courrier doit préciser :
- L’identité du locataire ;
- La nature de l’inexécution ;
- Le montant ou la nature de ce qui est réclamé ;
- La date d’exigibilité.
En cas de non-respect, le cédant peut engager la responsabilité contractuelle du propriétaire bailleur et réclamer des dommages et intérêts s’il justifie de l’existence d’un préjudice.
La faute du bailleur
L’on pourrait se demander si l’abstention d’informer le cédant par le bailleur peut être considérée comme une faute. Selon la Cour de Cassation, le fait pour un créancier d’agir en recouvrement de sa créance dans le délai de prescription n’est pas constitutif d’une faute, sauf abus dans l’exercice de ce droit (Cass. Com., 2 novembre 2016).
La responsabilité du bailleur est engagée pour faute dans certaines circonstances :
- Il n’a adressé au cessionnaire n’ayant jamais payé ses loyers, ni courrier ni lettre recommandée avant une sommation de payer ;
- Il n’a pas informé le cédant du défaut de paiement ;
- Il n’a jamais tenté de récupérer les loyers auprès de cessionnaire pendant trois ans.
Le cabinet LLA Avocats est à votre disposition pour toutes questions sur la cession du droit au bail !