La déclaration de créance auprès du mandataire judiciaire est une obligation pour le créancier afin de faire valoir sa créance. L’admission de cette créance permet au créancier de faire partie des créanciers à désintéresser dans le cadre de la procédure collective d’apurement du passif. Cette déclaration de créance équivaut à une demande en justice et elle doit suivre des formalités telles que la nécessité d’un mandat spécial en cas de représentation, le respect d’un délai, … La question qui se pose est de savoir si la nullité de la déclaration de créance est une conséquence du non-respect d’une des formalités.
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L’obligation de déclaration de créance
La déclaration de créance est une étape obligatoire pour tous les créanciers d’une entreprise en difficulté. Il s’agit de la seule garantie qu’ils puissent avoir d’être payés à la fin de la procédure de liquidation. Une déclaration de créance se fait préalablement au jugement d’ouverture de la procédure collective. Il faut remarquer que selon la jurisprudence, la déclaration de créance est considérée comme une action en justice (Cass com 14 février 1995 n°93-12064, Cass plén 4 février 2011 n°09-14619).
Selon les cas, elle se fait auprès du mandataire judiciaire ou du liquidateur judiciaire par lettre recommandée avec avis de réception. Dans une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, c’est le mandataire judiciaire qui est compétent pour recevoir la déclaration de créance. Par contre, s’il s’agit d’une procédure de liquidation judiciaire, elle se fait au niveau du liquidateur. Le créancier peut se faire représenter lors de la déclaration de créance. Elle peut, en effet, être effectuée par le représentant légal ou par un préposé. La représentation doit ainsi être matérialisée par une délégation de pouvoir en bonne et due forme.
Les conditions de validité d’une déclaration de créance
On peut affirmer que la déclaration de créance ne nécessite pas un formalisme particulier. Toutefois, pour qu’une déclaration de créance soit valide, il existe quelques conditions à respecter.
D’abord, dans la déclaration, il faut que le créancier indique plusieurs informations cruciales, notamment le montant des créances dues au jour du jugement d’ouverture. En outre, le montant des créances ainsi que leurs échéances doivent aussi être précisés. C’est l’article L. 622-25 du Code de commerce qui prévoit ces mentions obligatoires.
Par ailleurs, étant donné qu’un créancier peut disposer d’une sûreté, laquelle lui permet d’être payé en priorité, la nature et l’assiette de ladite sûreté soit être déclarée. La créance ainsi que son montant doit être justifiée par des documents à joindre à la déclaration. Néanmoins, il y a une exception, pour les créances dites « créances salariales ». Les salariés sont des créanciers « superprivilégiés » qui n’ont pas à déclarer leurs créances.
Ensuite, l’une des conditions les plus importantes à respecter dans le cadre d’une déclaration de créance est le délai. En fait, il est de 2 mois à partir de la publication du jugement d’ouverture au Bodacc. Pour les créanciers qui résident hors de la France métropolitaine, le délai est de 4 mois. Il faut remarquer que pour certains créanciers particuliers, notamment le créancier titulaire d’une sûreté ou d’un contrat, doit être averti personnellement par le mandataire judiciaire. Cet avertissement doit se faire dans les 15 jours suivants l’ouverture de la procédure collective.
La nullité de la déclaration de créance, possible ?
Au vu de ces conditions, on peut penser que la déclaration de créance peut être annulée dans le cas où l’une de ces conditions n’est pas respectée. Mais, ce n’est pas toujours le cas.
Les cas de nullité de la déclaration de créance
Les cas de nullité de la déclaration de créance sont très rares. Néanmoins, on peut citer quelques cas.
D’abord, une déclaration peut être adressée à la personne ayant la qualité à recevoir la déclaration, mais si elle est effectuée par une personne non visée à la déclaration de créance, elle est nulle. En d’autre terme, la représentation est irrégulière (Cass com 4 novembre 2014 n°13-24014).
Par ailleurs, une déclaration de créance avec une adresse erronée est irrégulière. C’est le cas lorsque le créancier adresse la lettre recommandée au débiteur et non au mandataire judiciaire (Cass civ 1ère 12 avril 2005 n°02-21223).
Une déclaration de créance adressée à l’administrateur judiciaire est également irrégulière (Cass com 22 juin 1993 n°87-19183 ; Cass com 14 février 1995 n°92-17395). Néanmoins, si l’administrateur judiciaire transmet cette déclaration dans le délai légal au mandataire judiciaire, elle est valable (Cass com 6 janvier 1998 n°95-11894; Cass com 8 octobre 1996 n°94-17520).
Enfin, on peut déduire d’une jurisprudence que la non-justification du pouvoir de représentation peut entraîner la nullité d’une déclaration de créances. Dans un arrêt, un chef de file d’un pool bancaire ayant consenti un crédit-bail avait agi en son nom et pour le compte des autres banques en déclarant la totalité de la créance. La nullité de la déclaration avait été soulevée par le liquidateur vu qu’aucun des mandats spéciaux et écrits, consentis par les autres membres du pool, n’avaient pas été produits dans le délai imparti. Les juges ont refusé cet argument et ont avancé que les justificatifs des mandats étaient déjà fournis antérieurement à la déclaration de créance (Cass 4 février 2011, Pourvoi n° 09-14.619).
Les cas où les irrégularités sont indifférentes
Plusieurs cas d’irrégularités non rédhibitoires peuvent être cités.
D’abord, adresser une déclaration de créance à plusieurs mandataires judiciaires n’est pas n’est pas une cause de nullité. En effet, il est évident que la déclaration est adressée à l’un d’eux (Cass com 27 mars 2007 n°05-20574; Cass com 21 mars 2006 n°05-11440; Cass com 30 mai 2006 n°05-14248).
De plus, sur la base de l’article 115 du CPCiv, la nullité peut être couverte par la régularisation ultérieure de l’acte si aucune forclusion n’est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief. Toutefois, il existe des nullités qui ne peuvent être régularisées. C’est le cas du défaut de production de pouvoir, dans le délai imparti pour la déclaration de créance et qui constitue une nullité de fond. Cette nullité ne peut être régularisée lorsque le délai pour agir est expiré.