Convention de croupier : Il arrive qu’une personne veuille participer à une société sans toutefois se faire connaître. La convention de croupier est un des meilleurs instruments pour ce faire. Anciennement prévu par le Code civil français en son article 1861, cette convention est tombée en désuétude et relève désormais de la liberté contractuelle. Elle existe encore dans le code civil monégasque (monaco) sous l’article 1699 du code civil de la principauté de monaco.
Sommaire de l'article
La définition de la convention de croupier
La convention de croupier est un accord de volonté entre un cavalier, associé d’une société, et un tiers appelé le croupier. Ces parties conviennent d’attribuer à ce dernier tout ou partie des bénéfices et pertes de la participation du cavalier dans la société. Ainsi le cavalier ne cède pas ses parts sociales, il ne cède que ses droits pécuniaires au croupier.
Ainsi, le cavalier reste le propriétaire des parts sociales, le croupier participe partiellement ou totalement aux bénéfices et pertes de la société sans que les tiers tels que les associés ne le sachent. Il faut préciser qu’auparavant la convention de croupier était prévue afin de permettre aux associés de pallier l’interdiction de cession des parts sociales sans l’agrément de tous les associés (société de personne). L’ancien article 1861 du code civil disposait qu’il était possible pour chaque associé de « s’associer » sans le consentement de ses coassociés à « une tierce personne relativement à la part qu’il [avait] dans la société » même sans leur consentement. Néanmoins, l’article interdit à l’associé cavalier d’associer le tiers à la société alors même que ce cavalier en aurait l’administration.
Différents mécanismes ont été instaurés, depuis 1978, pour permettre aux associés de sortir de la société sans encombre, en tenant compte des conseils et de l’expertise d’un avocat en droit des affaires.
Le contenu de la convention de croupier
Concrètement, la convention de croupier est un contrat comme les autres. La liberté contractuelle est la règle. Ainsi, elle contient ainsi les stipulations sur la durée de la croupe, l’apport du croupier, sur les charges et produits issus de la convention, les obligations du cavalier, les droits du croupier, le caractère occulte ou ostensible de la convention, une clause attributive de compétence, une clause de droit applicable, la fin de la croupe …
La convention peut, à la guise des parties, prévoir des hypothèses et les obligations qui en découlent. Par exemple, une convention peut prévoir qu’en cas d’augmentation du capital, le cavalier peut exercer son droit de souscription avec ou sans la participation du croupier.
La convention peut être assimilée à une société en participation étant donné qu’il y a réunion de l’affectio societatis et des apports. Seule l’immatriculation n’a pas été effectuée.
L’intérêt de la convention de croupier
La convention de croupier présente de nombreux avantages qui séduisent les parties.
1. La liberté des associés
Le principal intérêt de la convention est la possibilité pour l’associé de se retirer pécuniairement de la société sans devoir recueillir l’agrément des associés. Il s’agit donc d’un moyen pour lui de pouvoir se retirer d’une société, surtout les sociétés de personne (SNC, SCI, SARL) dans laquelle la cession des parts sociales est difficile.
La convention n’emporte donc pas transfert de la propriété des parts. La liberté du cavalier est limitée.
2. La discrétion des associés
- Le croupier peut vouloir privilégier avant tout son identité et ne veut pas révéler sa participation aux autres associés ou au public.
- L’anonymat est ainsi au centre de la convention pour des raisons légitimes et licites ou pour des raisons illicites telles le contournement d’une interdiction de gérer ou une clause de non-concurrence.
- Il est important de préciser également que le croupier pourrait être un futur associé qui aspire d’acheter les parts de l’associé cavalier. Ainsi, la convention constitue un préalable à une cette cession future en attendant l’agrément des autres associés.
3. Un outil de financement temporaire
La convention de croupier permet à un associé de préserver sa qualité d’associé mais en utilisant cette qualité pour obtenir un prêt de la part du croupier. Les dividendes feront office de remboursement. Une fois le prêt totalement remboursé, l’associé recouvre tous ses droits pécuniaires.
Le régime juridique de la convention de croupier
Les règles régissant la convention de croupier sont celles des sociétés en participation. En effet, il est possible de prouver l’existence d’une société en participation à partir d’une convention de croupier. Les trois critères sont l’affectio societatis, l’apport, la communauté d’intérêt. La société n’a pas de personnalité juridique.
Comme les sociétés en participation, la convention de croupier fait obligatoirement l’objet d’une déclaration auprès du service des impôts des entreprises. De plus, il est nécessaire de produire annuellement une déclaration des résultats et tenir une comptabilité régulièrement. Sur le plan fiscal, les associés, c’est-à-dire le croupier et le cavalier, sont soumis à l’impôt sur le revenu (article 242, 1 et annexe III article 48, du CGI).
Les effets de la convention de croupier
La convention de croupier est une cession de part très imparfaite. Ainsi ses effets sont limités.
1. Principe : cession des droits pécuniaires et non des parts (effet simplement pécuniaire)
La convention de croupier n’entraîne pas en principe transfert de propriété ou de droits politiques (vote, information). Elle ne concerne que l’aspect pécuniaire des parts. Le cavalier rétrocède au croupier tout ou partie des bénéfices auxquels il a droit. Le croupier participe également aux pertes financières.
La convention spécifie ainsi dans ses articles la nature exacte des produits et charges. Par exemple, les produits sont la fraction revenant aux actions ou parts sociales concernées dans les bénéfices, réserves, primes ou boni de liquidation sous toutes formes, les éventuelles plus-values rattachées aux actions, …
Le croupier n’a pas son mot à dire sur la vie de la société et n’a pas à être informé.
2. Exception possible selon la volonté des parties
Le croupier peut avoir droit de se faire délivrer l’information relative à la société, celle en lien avec les parts qui constituent la croupe. De plus, la convention peut également prévoir une concertation entre les parties avant chaque assemblée générale. Il faut préciser qu’il est aussi possible de prévoir une convention de vote qui obligerait le cavalier à se conformer aux instructions du croupier lors du vote.
Le transfert des parts sociales au croupier à la fin de l’accord ?
À la fin de l’accord, à l’arrivée du terme prévu par exemple ou à la résiliation du contrat, le croupier ne reçoit pas les parts sociales. De plus, la convention de croupier n’est pas une convention de portage où le donneur d’ordre donne ses parts à un porteur qui s’engage à céder les parts ou actions selon les conditions de la convention.
Néanmoins, ce transfert de propriété peut être envisageable si la convention le prévoit. Cette solution a été donnée par la cour d’appel de Paris, dans un arrêt en date du 28 janvier 2021 (CA Paris, 28 janv. 2021, n° 20/01252).
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