Par principe les associés d’une SCI, Société civile immobilière, sont indéfiniment responsables des dettes sociales à proportion de leurs parts dans le capital social. Cependant les créanciers d’une SCI, s’ils ne sont pas désintéressés par la saisie de son patrimoine, pourront en plus saisir les biens présents dans le patrimoine personnel des associés. Toutefois, ce principe connait de nombreux tempéraments, qu’il convient d’exposer :
Sommaire de l'article
A) Premier tempérament : la responsabilité subsidiaire des associés d’une SCI
La responsabilité des associés ne peut être engagée que pour suppléer la SCI défaillante. En effet l’ article 1858 du Code civil précise que le créancier ne peut poursuivre l’associé qu’après avoir « préalablement et vainement » poursuivi la société.
La jurisprudence considère donc que l’exercice de mesures d’exécution à l’égard de la société est requis avant de poursuivre les associés et qu’il faut établir que ces mesures sont restées vaines, c’est-à-dire que le patrimoine social est insuffisant pour désintéresser le créancier (Cass. 3e civ, 6 janv., 1999, n°97-10.645).
De ce fait, un créancier de la société ne peut attaquer ses associés qu’après avoir préalablement et vainement tout essayé pour faire payer la SCI (et donc après une procédure contre la société civile).
Les poursuites préalables
La poursuite préalable signifie que le créancier a sérieusement cherché à faire payer la SCI avant de se retourner contre les associés. Ainsi selon la jurisprudence, l’envoi de simple commandement de payer ou de mise en demeure restées infructueuses est insuffisant pour caractériser la condition de « poursuites préalables. En revanche, la mise en demeure est un préalable nécessaire (cette formalité peut toutefois être régularisée postérieurement à l’introduction d’une action individuelle contre les associés (Cass. com., 12 sept. 2007, n° 06-15.329).
Nécessité d’un titre
Toutefois, pour pouvoir poursuivre les associés sur leur patrimoine, le créancier devra posséder préalablement un titre contre la société (Cass. 3e civ., 2 déc. 1980). C’est-à-dire une décision de justice condamnant la société, même s’il ne s’agit pas encore d’un titre définitif (pour une ordonnance de référé : Cass. 2e Civ., 17 fév. 1988 ; pour un jugement assorti de l’exécution provisoire : Cass. 3e Civ., 8 mars 1995, n°93-11.267). Même si la jurisprudence est partagée sur ce point, les juges du fond ont parfois reconnu la possibilité d’assigner la société et les associés dans le cadre au cours d’une même instance (CA Grenoble, 2e Ch. Civ., 9 sept. 2014, n°13/03036)
Les poursuites vaines
L’article 1858 du Code civil dispose que « les créanciers ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé qu’après avoir préalablement et vainement poursuivi la personne morale. »
Ainsi, les diligences des créanciers aux fins de recouvrement de leur créance à l’encontre de la société civile doivent être infructueuses. Le caractère infructueux doit résulter de l’insuffisance du patrimoine social de la société civile (Chambéry, 6 avril 2017, RG n°15/01967 ; Cass. Civ 3ème, 6 janvier 1999, n° 97-10645 ; Cass. Civ 3ème, 6 juillet 2005, n° 04–12175).
Par un arrêt du 2 novembre 2011, la Cour de cassation a rappelé le principe des vaines poursuites : « Attendu qu’en se déterminant ainsi par des motifs qui ne suffisent pas à établir que toutes les poursuites contre la SCI auraient été vaines du fait de l’insuffisance du patrimoine social, la Cour d’appel n’a pas donné de base légale à cette décision » (Cass. Com., 2 novembre 2011, n° 10- 24 114 et 10 – 28 657) ».
En conséquence, il appartient au créancier de démontrer qu’il a vainement essayé de réaliser l’intégralité du patrimoine de la SCI que ce soit sur ses biens immobiliers ou sur ses biens mobiliers.
En revanche la clôture de la liquidation d’une société dissoute, ou une procédure collective à l’encontre d’une société, dispensent le créancier de démontrer que le patrimoine social est insuffisant pour le désintéresser. Après avoir rendu des solutions nuancées, la Cour de cassation a affirmé que lorsque la société civile est en liquidation judiciaire, la déclaration de la créance est suffisante, le créancier pourra poursuivre les associés sans avoir à établir que le patrimoine est insuffisant pour le désintéresser (Cass. ch. mixte, 18 mai 2007, n° 05-10.413).
B) Deuxième tempérament : la responsabilité non solidaire des associés d’une SCI
L’associé de la SCI est tenu conjointement et non solidairement des dettes sociales. L’associé est tenu des dettes au-delà de son apport. Mais l’associé répondra des dettes seulement à proportion de sa part dans le capital social. Ainsi le créancier doit diviser les recours, il ne pourra pas demander l’intégralité de sa créance à l’un des associés.
La responsabilité des associés de SCI est indéfinie mais non solidaire. Cela signifie :
- responsabilité indéfinie: un associé de SCI est responsable des dettes de la société sur son propre patrimoine.
- responsabilité non solidaire: les associés sont responsables des dettes de la SCI proportionnellement à la part du capital social qu’ils détiennent. Ainsi l’ article 1857 du Code civil pose le principe de la responsabilité illimitée des associés de la société civile au paiement des dettes sociales. Si elle pèse sur chaque associé, il est possible d’aménager cette responsabilité, le tiers pouvant s’engager à ne pas poursuivre l’un des associés ou bien ces derniers pouvant convenir statutairement d’une répartition du paiement des dettes sociales distincte de leur part dans le capital social, sous réserve de la nullité des clauses léonines. La responsabilité des associés dans la société civile est conjointe, le créancier ne peut donc demander le paiement de la totalité de la dette à un seul associé, il doit diviser ses recours et supportera donc l’insolvabilité éventuelle des associés.
C) Troisième tempérament : La prescription de l’action en responsabilité personnelle des associés d’une SCI.
Les actions contre les associés se prescrivent par cinq ans à compter de la publication de la dissolution de la société. L’article 1859 du Code Civil dispose que :
« Les actions contre les associés se prescrivent par cinq ans à compter de la publication de la dissolution de la société. »
Le point de départ de la prescription de l’action exercée par les créanciers sociaux contre un associé correspond au caractère infructueux de la mise en demeure adressée à la société, après avoir obtenu un titre à son égard (Cass. 3e civ., 14 sept. 2017, n°16-20.110, société Caisse d’Épargne et de Prévoyance Cote d’Azur c/ société Jad).
La détermination de l’associé responsable des dettes sociales en cas de cession de droits sociaux découle de l’ article 1857 du Code civil qui indique qu’il convient de prendre en compte la date d’exigibilité de la créance ou au jour de la cessation des paiements. Ainsi, l’associé qui quitte la société ne sera responsable que des dettes devenues exigibles avant que la cession ou le retrait de la société soit publié au RCS.