Les sociétés civiles agricoles sont souvent exploitées en famille. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle elles sont propices aux mésententes qui surviennent dans la plupart des cas à la suite d’un héritage ou d’une donation de parts par les parents. La dissolution peut être prononcée ou non par le juge après la constatation d’un blocage dans le fonctionnement de la société.
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La mésentente entre associés au sein d’une société civile d’exploitation agricole
Toute société ne peut valablement se créer sans affectio societatis. Cette volonté de collaborer ensemble pour poursuivre un but commun permet à la société de fonctionner correctement. Cette affectio societatis est d’autant plus importante dans les sociétés civiles agricoles car elles sont souvent exploitées en famille et le lien émotionnel exacerbé les conflits. Ce type de société a pour objectif d’exploiter les terres agricoles et forêts, de gérer les terres bâties ou non bâties.
La jurisprudence sur les mésententes de membres de la même famille, associés au sein d’une société civile agricole est très bien fournie. Il est fréquent que la succession suite au décès d’un exploitant agricole cause des tracas qui aboutit à la dissolution de la société (CA Pau, 2e ch. sect. 2, 30 mai 2022). Il arrive également que les associés, époux divorcent et la collaboration est rendue impossible.
Les issues possibles d’une mésentente entre associés dans un groupement foncier agricole
Le recours aux modes alternatifs de règlement des litiges
La résolution amiable des conflits est une mesure qui devrait être considérée avant toute autre mesure drastique. La conciliation ou la médiation permettent de remédier rapidement à des situations de blocage du fonctionnement de la société. La recherche de compromis est l’objectif poursuivi. Par ailleurs, le caractère familial de la société agricole est un terrain propice à ce type de règlement de litiges.
Le retrait de l’associé mécontent ou à l’origine de la mésentente
Il est possible que la situation empire au sein de la société agricole. Face à cela, le retrait de l’associé à l’origine de la mésentente semble la seule issue. Cependant, ce retrait ne peut se faire sans contraintes selon l’article 1869 du Code Civil. Il doit être, soit strictement encadré par les statuts, soit décidé à l’unanimité par les autres associés, soit autorisé pour justes motifs par le juge. Le retrait est interdit sans autorisation d’une clause statutaire.
La mésentente causant un blocage du fonctionnement de la société : motif de dissolution par le juge
La saisine du juge doit être l’ultime solution en cas de mésentente entre les associés. En fait, un associé peut saisir le juge afin de dissoudre la société qui présente une situation grave de mésentente. Il est toutefois requis que la mésentente paralyse le fonctionnement de la société selon les dispositions de l’article 1844-7, 5° du Code civil. Toute mésentente n’appelle pas à la dissolution. Dans la jurisprudence de la Cour d’appel de Pau (CA Pau, 2e ch. sect. 2, 30 mai 2022), la paralysie de la société se manifeste par des faits qui bloquent le fonctionnement de la société.
L’on peut citer l’absence de gérant, l’opposition systématique entre les associés rendant impossible la prise de décision collective vitale pour la survie de la société. L’intérêt de la société, ainsi que des tiers sont en danger. Il faut préciser que toutes les décisions prises dans une société civile d’exploitation agricole sont prises à la majorité.
Ne constitue pas une paralysie de la société, la mésentente entre les associés égalitaires qui bloque la prise de décision (Cass Com, 5 avril 2018). En effet, dans le cas d’espèce, les statuts ont prévu que le gérant avait une voix prépondérante en situation de partage des voix.