L’aventure sociale nécessite la cohésion et la solidarité entre les associés. C’est la raison pour laquelle l’affectio societatis est l’un des éléments constitutifs de toute société (article 1832 du Code civil). Elle est d’autant plus importante dans les sociétés où l’intuitu personae est fort (société civile professionnelle). Dans la réalité, les mésententes grave au sein de la société peuvent se produire au sein de la société et il arrive que les associés ne trouvent pas de solutions pour y remédier. Plusieurs choix s’offrent à eux : le retrait ou la dissolution judiciaire de la société.
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La mésentente et ses manifestations au sein de la société
La mésentente, autrefois dénommée « mésintelligence » se traduit surtout par la disparition de l’affectio societatis qui est une volonté de collaborer sur un même pied d’égalité à l’atteinte des objectifs communs. Les associés vont donc à la fois participer aux bénéfices et aux pertes d’une entreprise commune . Selon la Cour de cassation (Cass. com., 10 avril 2019). Selon cette jurisprudence, la mésentente se manifeste par une grande difficulté voire une impossibilité de continuer l’aventure sociétale du fait de la dégradation des relations entre les associés.
Pas de droit de retrait dans les sociétés commerciales
Le droit de retrait est interdit dans les sociétés commerciales classiques (SARL, SAS, SA). Cela signifie que quand bien même des statuts ou un pacte le prévoiraient, la clause serait illicite. Les tribunaux n’ont pas plus le pouvoir d’autoriser le retrait judiciaire en cas de mésentente entre associés d’une SARL ou SAS. Cass civ 1ère 12 décembre 2018 n°17-12467.pour une société d’exercice libéral à responsabilité limités d’avocats.
Dans ces conditions,, l’associé qui souhaite se retirer n’aura d’autre choix que de trouver un acquéreur pour ses parts et en cas de refus d’agrément, la société sera obligée de faire racheter ses parts ou réduire le capital pour les annuler (SARL).
Le droit de retrait dans les sociétés civiles
Le retrait de l’associé à l’origine de la mésentente
Si la mésentente est grave, alors les associés n’ont pas de choix que d’exclure un associé ou de demander la dissolution de la société. Dans certains cas, la dissolution n’a été envisagée qu’après l’échec du retrait de l’associé (Cour de cassation (1re civ.), 15 juin 2022, n° 20-18.781).
Le retrait est la solution la moins agressive pour la société. En outre, il doit résulter de la décision à l’unanimité de l’assemblée générale des associés. Si le retrait est refusé, il est impératif de saisir le juge. Le retrait est assez compliqué puisque les parts de l’associé exclu doivent être vendues à un des associés ou à un tiers.
La dissolution judiciaire de la société pour mésentente
La dissolution doit être l’ultime solution lorsqu’il y a une mésentente dans la société. Elle est prononcée par le juge qui constate la réunion de plusieurs conditions notamment la paralysie de la société. Le Code civil prévoit ainsi en son article 1844-7 5° la dissolution anticipée de la société pour justes motifs.
La dissolution de la société, une exception
La dissolution est une exception. En effet, la dissolution d’une société ne devrait se faire que lorsqu’il y a une cessation de paiement et que le redressement judiciaire a échoué.
La dissolution pour mésentente est ainsi anticipée et forcée.
En outre, la dissolution est l’exception. Etant donné que le juge doit toujours chercher à favoriser la survie de la société. Elle ne doit pas être hâtive. Néanmoins, le juge a intérêt à savoir faire une anticipation de la dégradation de la situation. Et surtout ne doit pas être trop stricte quant aux critères de dissolution.
Cette dernière ne doit pas être différée et tardive afin de ne pas aggraver les difficultés de la société. Le juge adopte ainsi une appréciation souple des critères de dissolution (Cour de cassation (1re civ.), 15 juin 2022, n° 20-18.781).
Les conditions restrictives de la dissolution de la société pour mésentente
Le juge vérifie ainsi la réunion de plusieurs conditions restrictives.
D’abord, la demande de dissolution ne doit pas venir de l’associé à l’origine de la mésentente. Ensuite, le juge peut également vérifier que la mésentente soit assez profonde et engendre une paralysie du fonctionnement de la société. Cette paralysie est appréciée au cas par cas. Dans l’arrêt de la Cour de cassation (Cour de cassation (1re civ.), 15 juin 2022, n° 20-18.781), la plupart des décisions sont prises à l’unanimité.
Or, la mésentente ne permet pas aux associés de parvenir à une unanimité. Par exemple, dans le cas d’espèce, l’assemblée générale ordinaire n’a plus été convoquée, les comptes des exercices de deux années n’ont pas été approuvés, aucune décision collective concernant la SCP ne pouvait être prise. Il y a donc blocage total du fonctionnement de la société. Sa viabilité et son maintien sont alors impossibles.
La dissolution aboutit à la liquidation de la société après la nomination du liquidateur.